Les parents de Ritu se sont séparés alors qu’elle n’était encore qu’un bébé. Un peu plus tard, son père devait mourir subitement laissant sa  nouvelle femme avec un nouveau né, issu de leur union.  Aujourd’hui,  Ritu se souvient et nous écrit : “Je n’ai pas conservé en mémoire, le moindre fragment d’image de mon père. Les jours se sont enchainés alors sous la protection chaleureuse de ma grand-mère. Maintenant, je réalise à quel point ces temps furent difficiles pour ma grand-mère. Malgré son grand âge, elle fit de son mieux pour s’occuper de moi. Je me souviens surtout de la chaleur de sa main pour m’apprendre à marcher.  Seule, elle n’avait pas les moyens de m’envoyer à l’école et me confiait alors à Thanaka.”

Ritu est âgée de 4 ans, quand elle arrive à l’orphelinat en 2004. Entourée de ses nouveaux frères et soeurs d’adoption, elle devient très vite la petite mascotte de Thanaka pour tout le monde. Son oeil pétille, son esprit est vif , elle s’affiche en petite canaille. J’ai le souvenir d’une petite fille au sourire malicieux toujours prête à jouer et me défier. Quand je la surnomme affectueusement “Miss Ritu”, elle me rétorque “I am not Miss, I am student !”.

Ritu s’affirme très vite à l’école. Elle est chaque année déléguée de classe, ce n’est pas par hasard. Chaque soir, quand la maisonnée s’affaire aux devoirs dans la pénombre des lampes solaires, elle est la première à terminer.  N’allez pas penser qu’elle bâcle ; au contraire ! Le travail est parfaitement executé et les resultats sont au rendez-vous. Pendant toute sa scolarité dans le primaire et le secondaire Ritu sera première de sa classe. Elle laissera peu de chance à Bindira de lui détrôner la place, laissant celle-ci toujours en deuxième position.

Au fil des années, son visage d’enfant espiègle disparait sous les traits d’une jolie jeune fille au regard attendrissant. Elle devient plus discrète. Sa voix est extrêmement douce.  Son regard ne trahit pas, elle observe et analyse. Dès qu’elle en a l’occasion, elle se rapproche à la recherche d’une marque de tendresse. Il s’agit de cette même affection qui la rapprochait de sa grand-mere, longtemps auparavant, quand elle venait lui rendre visite à l’orphelinat. C’est aussi cette même affection qu’elle traduit par des mots, à ses amis, à travers les réseaux sociaux.

Aujourd’hui, Ritu termine un premier cycle de trois ans de préparateur en pharmacie. Elle se lève à 5h00 du matin pour marcher dans la nuit avant de récupérer un bus pour se rendre à son institut hospitalier de Bhaktapur. Au regard des résultats, elle parvient en troisième position sur une promotion de 37 étudiants.

Dans une lettre récente, elle nous dévoile pudiquement son envie de poursuivre en Bachelor de Pharmacie. Elle termine sa lettre dans un excellent anglais par ces mots : “je souhaite exprimer ma chaleureuse gratitude à tous les Thanaka members et à tous les gens bien intentionnés pour m’avoir aidée à devenir indépendante. Je suis devenue celle que je suis grâce à ma famille Thanaka et à sa générosité. Je saurai être reconnaissante et redevable à cette famille jusqu’à la fin de mes jours. J’espère qu’un jour je serai capable à mon tour d’aider les gens nécessiteux de ma communauté et d’entretenir la fraternité en chaque homme.  Merci pour tout !”